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BlowUp : photographes de l'ordinaire

Publié le par MG

Contrairement aux années 1970, les artistes d'aujourd'hui ne veulent plus former un groupe ni un mouvement idéologique : ils se définissent plutôt comme une structure, veulent construire un espace, être liés à un lieu. Rassemblés autour d'une charte commune, BlowUp est l'exemple de ce type de coopération, d'aventure collective qui réunit cinq photographes belges participant individuellement ou ensemble à des projets protéiformes et répondant à des situations très différentes : dans l'évaluation de leurs oeuvres respectives, ils ne font aucune distinction entre les oeuvres réalisées dans le contexte de l'art et les travaux de commande particulière. Nicolas Bomal, Nicolas Clément, Isabelle Detournay, Cécile Michel et Aymeric Scuvie "multiplient (ainsi) depuis trois ans les collaborations avec des partenaires aussi diversifiés que (...) le groupe financier ING, le syndicat FGTB"1 ou l'association aRtmateuR et proposent, à travers leurs photographies, un regard particulier au sein d'un groupe.

Dans une époque où tout se fait à la dérobée et où tout passe presque inaperçu, il n'est pas étonnant que les artistes du collectif BlowUp se glissent incognito dans les villes et développent une esthétique de la furtivité. Les entrevues d'Isabelle Detournay avec des gens ordinaires, les prises de notes photographiques de moments croisés d'Aymeric Scuvie ou encore le projet collectif pour Des jardins révélés2, qui se veut la trace sensible d'une rencontre entre les artistes et les habitants d'un quartier, témoignent d'un certain engouement pour le banal, la modestie et le quotidien. "Il ne s'agit pas d'apporter une vérité sur un sujet, ni de rendre compte de ce qui se passe autour de nous"3, il est plutôt question de montrer simplement les choses, de révéler un réel lié à l'ordinaire et au détail anodin. C'est en cela que leur travail diffère tant du photo-journalisme que de la photographie attendue. En refusant les schémas traditionnels de la photographie (cadrages académiques, netteté du sujet...), les artistes du collectif BlowUp souhaitent revenir aux origines de la photo. Leurs démarches singulières, leurs intérêts relatifs à une esthétique de l'image à travers la thématique ou la technique, la révélation d'un détail presque insignifiant ou la proposition d'un regard discret sur un sujet, attestent d'une variété d'approches de cette idée de banalité.

S'il est vrai que le regard sur la banalité se généralise aujourd'hui dans l'ensemble des arts visuels, force est de constater que c'est la photographie qui suscite chez les artistes un enthousiasme particulier pour ce thème. Son accessibilité financière, sa facilité d'utilisation et sa rapidité d'exécution font de l'appareil jetable, du reflex ou du numérique, l'outil idéal de la transmission du banal. N'immortalisons-nous pas d'ailleurs les petits instants de nos vies à l'aide d'un appareil photo ? Cependant, comme aime à le rappeler Aymeric Scuvie, la remise en cause du "bon commandement de la photographie depuis les années 1950" ne doit pas empêcher l'artiste d'avoir un certain regard critique par rapport à la notion du "beau photographique"4. En privilégiant l'intimité et la singularité d'un sujet au détriment de son originalité et de sa spécificité, les artistes de BlowUp contribuent certes, à la destruction de ce que l'on appelle "l'aura" de l'oeuvre d'art. Néanmoins, parce que leurs photos demeurent avant tout de belles images, l'on aurait tort d'amalgamer ces photographes de l'ordinaire aux photographes amateurs.

1. Extrait du texte de présentation du collectif (site web 2004).
2. De juin à septembre 2004, l'association aRtmateuR, présidée par Damien Courcoux, proposera un parcours photographique dans les rues de Lille et donnera à voir des espaces inconnus de cette ville : ses jardins privés.
3. Entretien avec Aymeric Scuvie. Propos recueillis par MG à Lille, le 09 janvier 2004.
4. Id. Ibid.

MG - 12 mars 2004. Plaquette et photographies de l'exposition Des jardins révélés du 05 juin au 26 septembre 2004. Promenade artistique dans les jardins de Lille conçue par l'association aRtmateuR.

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M
Bonsoir Nadège,Les sujets retenus sont ordinaires : tuyaux d'arrosage, fleurs et plantes, personnes rencontrées dans la rue. Certaines photos (peut-être pas celles présentées ici) ne relèvent pas d'un cadrage sophistiqué et s'apparentent à celles que monsieur tout le monde pourrait prendre.Amitiés.
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N
Bonsoir Michael,Ces photos n'ont rien de banal, je les trouve paradoxalement très sophistiquées. J'ai le sentiment que les artistes plasticiens d'aujourd'hui abordent beaucoup le thème du quotidien, du banal... Je perçois cette approche comme un lieu de retranchement dans une société saturées d'images "tape-à-l'œil" et très séductrices.Merci pour cet article...Très belles photos.
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M
Ceci est le constat de la possibilité de déposer un commentaire sur mon blog !Merci Nadège.
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N
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