A Aniche, les caprices de Franck Marco informent

Comme il semble loin le temps où l’adjoint au maire Roger Facon invitait la population à vivre pleinement la culture ! Depuis son départ, on s’interroge toujours sur l’inexistence de programme culturel et plus encore sur l’effacement de tout conseiller municipal délégué à ce domaine. Et que penser du manque de communication annonçant un événement littéraire ou artistique à Aniche (59580) ? Fort heureusement, me direz-vous, Serge Ottaviani et Didier Margerin sont là pour rendre compte du peu de manifestations culturelles se déroulant dans notre commune.

Et c’est grâce à l’un des deux correspondants de presse précédemment cités que nous avons pris connaissance de la performance produite par le batteur-compositeur-réalisateur et peintre Franck Marco ce samedi 21 janvier dans la salle des mariages de l’hôtel de ville devant une poignée de personnes probablement informées par l’artiste. Là encore, on comprend le choix du lieu exigu pour cette drum-painting. Avis à la populace : « circulez, y’a rien à voir ! »

En réalité, non seulement il y avait à voir mais aussi à entendre lors de cette expérience pluridisciplinaire et évolutive. « J’improvise selon le rythme de la musique », confiera Franck Marco à l’issue de sa prestation immanente, percussive et haute en couleur. Pourtant, de l’improvisation à la composition picturale définitive, ne manque que l’intuition qui conduirait l’utilisateur d’acryliques à se soustraire du motif figuratif.

Les figures construites par la couleur industrielle, cernées par un trait noir maîtrisé, presque trop paralysées par ce besoin de séduire et de rassurer l’oeil du spectateur, ne nous éloignent guère des libertés formelles déjà prises au siècle dernier par Pablo Picasso (1881-1973) puis par Antonio Saura (1930-1998). En ce sens, l’invention que s’accorde Marco quand il agit en transe, pinceau en main sur fond musical, sur la surface bidimensionnelle de la toile rejoint l’idée de caprice défini par Giogio Vasari (1511-1574) pour mettre en exergue les qualités de Filippino Lippi (1457-1504), inventeur de formes bizarres que l’on pourrait contenir dans un cabinet de curiosités.

Monstrueux ou grotesques, les visages peints lors de la performance « clochent » à l’instar de ceux de Jérôme Bosch (vers 1450-1516), de Pieter Brueghel (vers 1525-1569) ou de Francisco Goya (1746-1828) comme s’ils se dégageaient avec effort du chaos matiériste de la peinture traînée sur la toile immaculée. Emprunté à l’italien capriccio signifiant frisson, le terme caprice convoque aussi le substantif caporiccio (horreur) lui-même dérivé de capora relatif à la tête, au chahut des visages, aux déformations des portraits qui se donnent à voir une fois la musique arrêtée.

Les têtes expressives voire horrifiantes, qui surgissent du tempo, se construisent presque à la vitesse du mouvement musical se jouant sous une lumière blanche artificielle. Elles peuvent peut-être encore surprendre le regardeur car c’est de la tâche que naît la forme et de la couleur que surgit l’identifiable. L’oeuvre totale de Franck Marco réalisée ce samedi en mairie devant un écran projetant son image d’artiste en train de faire continuera de nous interroger sur la notion d’accident et sur l’esprit du caprice. C'est pourquoi nous nous inquiétons du refus d'informer les publics d'une telle formation artistique.

Texte et photos : MG - 21 janvier 2023.