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La vie et l'oeuvre du sculpteur somainois Julien Rémy (1905-2001)

Publié le par MG

Julien Rémy (1905-2001)

Julien Rémy (1905-2001)

C’est dans la salle des cérémonies de l’hôtel de ville de Somain qu’Evelyne Werquin-Rémy a tenu sa première conférence sur la vie et l’oeuvre de son père, Julien Rémy. Sculpteur somainois né le 16 septembre 1905 et mort le 21 mars 2001, Julien Rémy laisse derrière lui un œuvre colossal qui s’est inscrit au cours du XXe siècle dans les paysages urbains de notre territoire. De Château-Thierry à Fâches-Thumesnil, sans oublier Saint-Pierre à la Martinique, ses rondes-bosses et reliefs témoignent d’un infatigable engagement physique pour façonner la pierre et d’une aptitude hors-du-commun pour donner de l’âme à des représentations tridimensionnelles.

Conférence d'Evelyne Werquin sur Julien Rémy dans la salle des cérémonies de la mairie de Somain - Photos : 27 septembre 2023.
Conférence d'Evelyne Werquin sur Julien Rémy dans la salle des cérémonies de la mairie de Somain - Photos : 27 septembre 2023.
Conférence d'Evelyne Werquin sur Julien Rémy dans la salle des cérémonies de la mairie de Somain - Photos : 27 septembre 2023.
Conférence d'Evelyne Werquin sur Julien Rémy dans la salle des cérémonies de la mairie de Somain - Photos : 27 septembre 2023.
Conférence d'Evelyne Werquin sur Julien Rémy dans la salle des cérémonies de la mairie de Somain - Photos : 27 septembre 2023.
Conférence d'Evelyne Werquin sur Julien Rémy dans la salle des cérémonies de la mairie de Somain - Photos : 27 septembre 2023.
Conférence d'Evelyne Werquin sur Julien Rémy dans la salle des cérémonies de la mairie de Somain - Photos : 27 septembre 2023.
Conférence d'Evelyne Werquin sur Julien Rémy dans la salle des cérémonies de la mairie de Somain - Photos : 27 septembre 2023.
Conférence d'Evelyne Werquin sur Julien Rémy dans la salle des cérémonies de la mairie de Somain - Photos : 27 septembre 2023.
Conférence d'Evelyne Werquin sur Julien Rémy dans la salle des cérémonies de la mairie de Somain - Photos : 27 septembre 2023.
Conférence d'Evelyne Werquin sur Julien Rémy dans la salle des cérémonies de la mairie de Somain - Photos : 27 septembre 2023.
Conférence d'Evelyne Werquin sur Julien Rémy dans la salle des cérémonies de la mairie de Somain - Photos : 27 septembre 2023.
Conférence d'Evelyne Werquin sur Julien Rémy dans la salle des cérémonies de la mairie de Somain - Photos : 27 septembre 2023.
Conférence d'Evelyne Werquin sur Julien Rémy dans la salle des cérémonies de la mairie de Somain - Photos : 27 septembre 2023.
Conférence d'Evelyne Werquin sur Julien Rémy dans la salle des cérémonies de la mairie de Somain - Photos : 27 septembre 2023.
Conférence d'Evelyne Werquin sur Julien Rémy dans la salle des cérémonies de la mairie de Somain - Photos : 27 septembre 2023.
Conférence d'Evelyne Werquin sur Julien Rémy dans la salle des cérémonies de la mairie de Somain - Photos : 27 septembre 2023.
Conférence d'Evelyne Werquin sur Julien Rémy dans la salle des cérémonies de la mairie de Somain - Photos : 27 septembre 2023.

Conférence d'Evelyne Werquin sur Julien Rémy dans la salle des cérémonies de la mairie de Somain - Photos : 27 septembre 2023.

Pourtant, sa naissance ne le prédestine nullement à accomplir un art aussi difficile et éreintant. En effet, ce fils d’industriel - son père Arthur (1878-1959) a conçu le premier cinéma de Somain et a fondé en 1922 dans cette même ville la Bouchonnerie-Capsulerie toujours en activité - « jeté comme la graine au gré de l’air qui vole » naît, comme l’écrivain Victor Hugo dans son poème Ce siècle avait deux ans (1830), « sans couleur, sans regard et sans voix ».

Prématuré et déposé sur le manteau de l’âtre, il survit mais avec un poumon atrophié. Enfant rêveur, Julien consacre son temps à dessiner ce que les irrégularités et aspérités des matériaux pourvoient de paréidolies. Désireux d’entrer à l’Académie des Beaux-Arts de Valenciennes, son père l’envoie, à 16 ans, apprendre le métier de forgeron. Cette formation professionnelle lui permettra par la suite de forger lui-même burins et autres outils de sculpteur. Deux ans plus tard, son ambition se concrétise : il a Maurice Ruffin (1880-1966) comme professeur de peinture et Elie Raset (1874-1956) pour l’initier à la sculpture.

Relief de Julien Rémy représentant le profil de maître Elie Raset, date non connue.

Relief de Julien Rémy représentant le profil de maître Elie Raset, date non connue.

Passionné de mythologie et doué pour modeler la terre comme pour tailler la pierre, il se distingue de ses camarades. Son professeur voit en lui un artiste prometteur. D’ailleurs, son Hercheur, représenté en contrapposto, lui permet de remporter à 22 ans le Premier Prix Roux de l’institut académique. La Terre lui vaudra, en 1928, de recevoir à nouveau cette récompense. Cette année-là, Julien part à Paris pour parfaire son apprentissage et prépare le Prix de Rome. Malheureusement, La Vocation de Saint-François d’Assise dans laquelle il a mis toute son énergie ne lui offre pas l’opportunité de séjourner à la Villa Médicis pour être en contact avec les modèles de l’Antiquité et de la Renaissance italienne.

Julien Rémy, "Le Hercheur", "La Terre" et "La Vocation de Saint-François d'Assise", 1928.
Julien Rémy, "Le Hercheur", "La Terre" et "La Vocation de Saint-François d'Assise", 1928.Julien Rémy, "Le Hercheur", "La Terre" et "La Vocation de Saint-François d'Assise", 1928.

Julien Rémy, "Le Hercheur", "La Terre" et "La Vocation de Saint-François d'Assise", 1928.

Persévérant, le jeune sculpteur tentera trois fois encore de remporter ce prestigieux Prix de Rome. S’il décroche quelques médailles, jamais il ne gagnera à ce concours artistique. Marié depuis peu à Lucienne Brabant et père d’un garçon en 1931, il renoncera définitivement à concourir pour ce Prix.

En 1932, Julien Rémy obtient enfin auprès de ses pairs une certaine reconnaissance grâce à son ensemble Le Retour des champs. Si, en 1928, La Terre lui a valu de recevoir au Salon des Artistes Français une médaille d’argent, sa vieille paysanne tirant un bouc lui offre une médaille d’or. Fort de son succès, le groupe sculpté dans la pierre et intitulé Le Retour des champs est aussitôt acquis par la ville de Paris qui l’offrira à la commune de Château-Thierry. Si on peut aujourd’hui l’admirer au Jardin des Petits Prés, il est attribué, par erreur, à l’artiste castelthéodoricien Achille Jacopin (1874-1958). En 1974, Julien se verra décerner au Grand Palais, le grand prix du Salon pour sa Qualité de la vie, sculpture de bois aujourd’hui conservée depuis 2023 au musée d’archéologie et d’histoire locale de Denain.

Julien Rémy, "Le Retour des champs" (1932) et "La Qualité de la Vie" (1974).Julien Rémy, "Le Retour des champs" (1932) et "La Qualité de la Vie" (1974).

Julien Rémy, "Le Retour des champs" (1932) et "La Qualité de la Vie" (1974).

En 1933, notre sculpteur expose à nouveau au Salon des Artistes Français. Il y présente le buste de son beau-père, le docteur Brabant exerçant à Somain. La critique élogieuse voit en lui « l’un des meilleurs sculpteurs contemporains ». L’année suivant, son buste de l’oto-rhino-laryngologue Jacquemaire pratiquant à Denain ainsi qu’une scène champêtre montrant une jeune fille donnant de l’herbe à une génisse attirent l’attention du jury du Salon parisien. Désormais, la maîtrise technique et la sensibilité de Julien Rémy touchent aussi bien une clientèle bourgeoise que des élus et des membres du clergé locaux, qui lui passent commande d’un grand nombre de monuments, de reliefs et de bustes.

Julien Rémy, "Portrait du Docteur Brabant" (1933), "Portrait du Docteur Jacquemaire" (1934), "Scène champêtre" (1934) et "Portrait du docteur, conseiller général et député Jean-Jacques Debève" (vers 1935).
Julien Rémy, "Portrait du Docteur Brabant" (1933), "Portrait du Docteur Jacquemaire" (1934), "Scène champêtre" (1934) et "Portrait du docteur, conseiller général et député Jean-Jacques Debève" (vers 1935).Julien Rémy, "Portrait du Docteur Brabant" (1933), "Portrait du Docteur Jacquemaire" (1934), "Scène champêtre" (1934) et "Portrait du docteur, conseiller général et député Jean-Jacques Debève" (vers 1935).Julien Rémy, "Portrait du Docteur Brabant" (1933), "Portrait du Docteur Jacquemaire" (1934), "Scène champêtre" (1934) et "Portrait du docteur, conseiller général et député Jean-Jacques Debève" (vers 1935).

Julien Rémy, "Portrait du Docteur Brabant" (1933), "Portrait du Docteur Jacquemaire" (1934), "Scène champêtre" (1934) et "Portrait du docteur, conseiller général et député Jean-Jacques Debève" (vers 1935).

Installé au 49 rue Léon-Gambetta à Somain, Julien consacrera le reste de son existence à exécuter dans la pierre ou le marbre le portrait en buste ou en pied de personnages réels, héroïques ou symboliques. Seule la Seconde Guerre mondiale ralentira son activité de sculpteur. Non mobilisable en raison de sa santé fragile, il travaillera dans le commerce de bouchons et exercera ensuite au lycée Henri-Wallon de Valenciennes en tant que professeur de dessin. En 1941, naît sa fille Evelyne, grande observatrice de l’oeuvre de son père.

Julien Rémy, "Monument de Jacques-Henri Bernardin de Saint-Pierre" (1936), groupe "Union et solidarité" (1936), "La Génise" (1937) et "La Maternité" (1938) en cours de réalisation à Somain.Julien Rémy, "Monument de Jacques-Henri Bernardin de Saint-Pierre" (1936), groupe "Union et solidarité" (1936), "La Génise" (1937) et "La Maternité" (1938) en cours de réalisation à Somain.Julien Rémy, "Monument de Jacques-Henri Bernardin de Saint-Pierre" (1936), groupe "Union et solidarité" (1936), "La Génise" (1937) et "La Maternité" (1938) en cours de réalisation à Somain.
Julien Rémy, "Monument de Jacques-Henri Bernardin de Saint-Pierre" (1936), groupe "Union et solidarité" (1936), "La Génise" (1937) et "La Maternité" (1938) en cours de réalisation à Somain.

Julien Rémy, "Monument de Jacques-Henri Bernardin de Saint-Pierre" (1936), groupe "Union et solidarité" (1936), "La Génise" (1937) et "La Maternité" (1938) en cours de réalisation à Somain.

Aujourd’hui encore, ses œuvres sculptées se dressent dans de nombreuses communes de la région. Le bas-relief La Maternité (1938) au-dessus de la porte de l’hôpital de Somain, son groupe en pierre à la Bourse de Travail de la même ville, les monuments de la Résistance à Fenain (1947) et à Orchies (1951), les Chemins de Croix à l’intérieur des églises de Bruille-lez-Marchiennes (1950) et de Somain (1955), la Sainte-Thérèse gisante et les fonts baptismaux (1951-1952) de l’église d’Hélesmes, le buste du préfet de Laon (1952), les reliefs (1955) de l’école Victor-Hugo de Somain, les bénitiers de l'église de la Renaissance et Notre-Dame (1956) de la chapelle au Mont-de-la-Paix à Auberchicourt, le buste du professeur Minne (1957) à la faculté de médecine de Lille, le buste d’Irène Joliot-Curie (1958) à Fenain, les hauts-reliefs de l’école de Fenain (1959) et de la mairie de Flers-en-Escrebieux (1960), les médaillons des Leroux (1964) et le bas-relief de l’Assomption (1976) à Orchies, les bas-reliefs (1969) de l’ancienne mairie de Villers-Campeau, celui (1970) de l’école de Dechy et ceux de l’école de Fâches-Thusmenil en sont de magnifiques exemples.

Julien Rémy, "Monument Suzanne Lanoy" à Bruilles-lez-Marchiennes (1946), "Monument de la Résistance" à Orchies (1951), "Irène Joliot-Curie" (1958), médaillon des "Frères Leroux" (1964) à Orchies, bas-relief de la mairie de Villers-Campeau (1969) et "Le Kangourou" (1974) à Fâches-Thumesnil.Julien Rémy, "Monument Suzanne Lanoy" à Bruilles-lez-Marchiennes (1946), "Monument de la Résistance" à Orchies (1951), "Irène Joliot-Curie" (1958), médaillon des "Frères Leroux" (1964) à Orchies, bas-relief de la mairie de Villers-Campeau (1969) et "Le Kangourou" (1974) à Fâches-Thumesnil.
Julien Rémy, "Monument Suzanne Lanoy" à Bruilles-lez-Marchiennes (1946), "Monument de la Résistance" à Orchies (1951), "Irène Joliot-Curie" (1958), médaillon des "Frères Leroux" (1964) à Orchies, bas-relief de la mairie de Villers-Campeau (1969) et "Le Kangourou" (1974) à Fâches-Thumesnil.
Julien Rémy, "Monument Suzanne Lanoy" à Bruilles-lez-Marchiennes (1946), "Monument de la Résistance" à Orchies (1951), "Irène Joliot-Curie" (1958), médaillon des "Frères Leroux" (1964) à Orchies, bas-relief de la mairie de Villers-Campeau (1969) et "Le Kangourou" (1974) à Fâches-Thumesnil.Julien Rémy, "Monument Suzanne Lanoy" à Bruilles-lez-Marchiennes (1946), "Monument de la Résistance" à Orchies (1951), "Irène Joliot-Curie" (1958), médaillon des "Frères Leroux" (1964) à Orchies, bas-relief de la mairie de Villers-Campeau (1969) et "Le Kangourou" (1974) à Fâches-Thumesnil.Julien Rémy, "Monument Suzanne Lanoy" à Bruilles-lez-Marchiennes (1946), "Monument de la Résistance" à Orchies (1951), "Irène Joliot-Curie" (1958), médaillon des "Frères Leroux" (1964) à Orchies, bas-relief de la mairie de Villers-Campeau (1969) et "Le Kangourou" (1974) à Fâches-Thumesnil.

Julien Rémy, "Monument Suzanne Lanoy" à Bruilles-lez-Marchiennes (1946), "Monument de la Résistance" à Orchies (1951), "Irène Joliot-Curie" (1958), médaillon des "Frères Leroux" (1964) à Orchies, bas-relief de la mairie de Villers-Campeau (1969) et "Le Kangourou" (1974) à Fâches-Thumesnil.

Julien Rémy restaurera aussi un buste de Napoléon placé dans la préfecture de Laon, un Christ du XVIIe siècle alors situé dans l’église Notre-Dame des Orages à De Sessevalle et un autre en bois dans l’église Saint-Michel à Somain. En 1958, Julien est nommé Chevalier de l'ordre des Arts et des Lettres. En 1982, son bas-relief La Vie est une musique lui permettra de remporter le Grand Prix Bandoz du Salon des Artistes Français. Et ce n’est qu’en 1993 que son nom sera gravé à l’intérieur de l’école supérieure d’art et de design de Valenciennes à côté d’anciens élèves ayant remporté le Prix de Rome.

Julien Rémy, restauration du Christ datant du XVIe siècle à De Sessevalle-Somain, "La Vie est une musique" (1982) et buste de son épouse Lucienne Rémy-Brabant (date non connue).Julien Rémy, restauration du Christ datant du XVIe siècle à De Sessevalle-Somain, "La Vie est une musique" (1982) et buste de son épouse Lucienne Rémy-Brabant (date non connue).
Julien Rémy, restauration du Christ datant du XVIe siècle à De Sessevalle-Somain, "La Vie est une musique" (1982) et buste de son épouse Lucienne Rémy-Brabant (date non connue).

Julien Rémy, restauration du Christ datant du XVIe siècle à De Sessevalle-Somain, "La Vie est une musique" (1982) et buste de son épouse Lucienne Rémy-Brabant (date non connue).

Excellant dans la représentation tant d’animaux que d’humains, doué pour traduire dans le bois et dans la pierre les attitudes et la profondeur d’une expression, Julien Rémy mérite un regard plus soutenu au travers d’une fortune critique ou d’un catalogue rétrospectif de son art. Peut-être que l’exposition, qui lui sera consacrée au musée d’archéologie et d’histoire locale de Denain en 2024 lors des Journées européennes du Patrimoine, sera l’occasion d’embrasser enfin de manière scientifique l’ensemble de ses créations.

Texte : MG – 27 septembre 2023. Documents photographiques : Evelyne Werquin-Rémy et Marc Debève (pour le buste de son grand-père Jean-Jacques Debève).

Article paru dans "L'Observateur du Douaisis" n°1082 du jeudi 5 octobre 2023.

Article paru dans "L'Observateur du Douaisis" n°1082 du jeudi 5 octobre 2023.

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