Bailleul : la méthanisation en débat

Organisée dans la salle Péguy par l’association « Non à la méthanisation à Bailleul », la journée d’information sur la méthanisation a permis au travers d’une exposition et de conférences-débats de mieux cerner les problématiques que soulève le process.

Représentant du Collectif National Vigilance Méthanisation (CNVM) qui regroupe à ce jour 74 assos, Freddy Garcia a ouvert son propos en rappelant les démarches menées dans le petit village de Gouy-sous-Bellonne pour s’opposer à l’implantation d’une unité au-dessus d’une nappe phréatique. « La méthanisation est un procédé que l’on souhaite raisonné », a-t-il dit. « Or, aujourd’hui on nous vend une méthanisation agricole à dimension industrielle qui nous inquiète. Face aux technocrates, on s’interroge sans pour autant obtenir de réponse. »

Selon lui, il faut d’abord mener un combat sur les déchets. « Le gaz vert n’existe pas : c’est du méthane plus ou moins pur. On peut aussi se demander si le digestat - cocktail d’intrants - est un fertilisant. Si les agriculteurs n’ont pas le droit de le vendre, ils peuvent néanmoins l’étendre sur le sol. On nous parle de dérèglement climatique alors que l’on ne tient pas compte du bilan carbone quand on fait venir des intrants par camion des Pas-Bas et de Belgique. Nous préférons privilégier les circuits-courts et, par conséquent la méthanisation dite à la ferme. Ainsi, l'argent public serait mieux réparti dans un esprit réellement écologique. »

Freddy Garcia a fait remarquer que « les agriculteurs s’associent aujourd'hui pour faire des usines à gaz dont la principale préoccupation est la rentabilité. » On oublie la terre nourricière. On ne se soucie pas des risques d’explosion, des odeurs, etc. « Au nom de la transition énergétique, nous demandons aux porteurs de projet de prendre le temps nécessaire pour sécuriser les populations surtout quand on sait que les contrôles de la DREAL (Direction Régionale de l'Environnement, de l'Aménagement et du Logement) ne pourront pas se faire régulièrement et inopinément. »

Plus technique, le conférencier a rappelé que l’on ne sait toujours pas ce qui se passe dans un méthaniseur. « Il y a des bactéries que l’on ne connaît pas. Dans la cuve, la température ne monte à qu'à 40° alors qu'une pasteurisation s’effectue à 90° et une stérilisation à 120°. Même avec un hygiénisateur (71°), certaines bactéries survivent. » Le digestat qui en résulte, chargé entre autres d’ammoniac, menace la biodiversité tant des sols que de l’air. « Or », a-t-il affirmé, « c’est en sauvant la biodiversité locale qu’on pourra sauver l’ours polaire. »

Le monde agricole actuel se divise : d’un côté on trouve des paysans ou des agriculteurs respectueux des sols, de l’autre des "énergiculteurs". De plus en plus de viticulteurs et de producteurs bio refusent l’épandage de digestat. La Confédération paysanne partage les inquiétudes des citoyens au sujet de la méthanisation pendant que l’État aspire à voir émerger une unité tous les six kilomètres. « S’opposer à la méthanisation, », prévient Freddy Garcia, « reste compliqué car on touche à la fois à l’environnement et à l’urbanisme. Dans cette lutte, notre principal ennemi reste la résignation. Nous devons donc nous montrer fermes sans être fermés au dialogue. Pour cela, il faut faire du bruit en relayant les informations dans la presse et sur les réseaux sociaux. »

Auditeurs, les membres de l'Association de défense environnementale de Monchecourt (Adem) ont aussi rendu compte de la situation qui les préoccupe depuis l'année dernière. Vers 15h, Daniel Chateigner, représentant du Collectif Scientifique National Méthanisation raisonnée, a pris le relais en soulevant en visioconférence la question énergétique d’aujourd’hui et de demain. La plupart de ses documents sont reproduits et diffusés ci-après. A Bailleul comme ailleurs, le débat autour de la méthanisation continue.

Texte et photos : MG - 15 février 2020. A Cécile Chombart, présidente de l'association "Non à la méthanisation à Bailleul".