Emilie Malaquin-Lapawa, Sombres hivers
Emilie Malaquin-Lapawa, "Sombres hivers" (nouvelles), Ed. Hyperion Avenue, Aniche, octobre 2019. Photo : première de couverture illustrée par Ugo Melcore & Rémy Fleury.
Ecrivaine publique et romancière, Emilie Malaquin-Lapawa signait en 2019 son second recueil de nouvelles fantastiques, Sombres hivers. Pris de court, nous étions malheureusement passés à côté de l’événement. C’est donc durant ces vacances de Noël que nous découvrons l’ouvrage, qui fait froid dans le dos.
Le recueil se compose de six courtes histoires regroupées en trois thèmes – les démons, l’amour et l’au-delà – ayant pour toile de fond un début d'hiver enneigé et pour ultime moment un Noël terrifiant. Période habituellement festive, la fin d’année revêt chez Emilie un manteau sombre et mortifère. Les dernières nuits de décembre sont longues, glaciales et ténébreuses. Tantôt les protagonistes sont démoniaques ; tantôt ils sont victimes de leurs passions. Même le chaton noir Méphistophélès, prince pourtant disgracié aux yeux de Lucifer par son rival Belzébuth, se montre plus maléfique que le Diable en personne !
Au fil des pages, le lecteur assiste, impuissant, à l’accomplissement d’actions malfaisantes, qui plongent leurs racines et prennent leur élan dans ce qu’il y a de plus morbide. Dans tous les cas, Noël est le point d’orgue qui conclut la descente aux enfers et le point d’appui d’une réincarnation ou d’une autre vie dans l’au-delà. L’écrivaine dresse avec profondeur le profil et les motivations de ses personnages ; elle nous fait entrer dans la noirceur des âmes qui hantent chacune des nouvelles.
Ces démons, fantômes ou funestes amoureux évoluent dans des décors urbains, structurés et structurants. Bien que leurs descriptions soient sommaires, elles offrent au lecteur un minimum d'éléments pour qu’il puisse se faire une image précise du lieu d’un ou de plusieurs crimes. Dans Un amour éternel par exemple, on suit les pas des protagonistes dans la Cracovie du début du XIXe siècle, depuis les hauteurs du château de Wawel jusque dans les rues pavées du quartier juif de Kazimierz en passant par la Halle aux draps et le chevet de la basilique Notre-Dame.
Economie descriptive des lieux et importance accordée tant à la dimension psychologique que symbolique : les ingrédients sont parfaitement dosés pour transcrire une atmosphère lugubre et froide et des desseins odieux et inhumains. En ce sens, le style d’écriture d’Emilie Malaquin-Lapawa, comparativement à celui de ses ouvrages précédents, s’est fluidifié et affiné. Nous n’exagérerons pas en affirmant que l’intensité narrative des six histoires surnaturelles de Sombres hivers n’est pas sans rappeler celle des maîtres du fantastique tant du XIXe que du XXe siècle. Emilie a publié aux éditions anichoises Hyperion Avenue un recueil de nouvelles devenues des classiques de l'irruption de l'extraordinaire dans un cadre ordinaire.
MG - 28 décembre 2020.