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ANICHE : une sculpture abandonnée et dégradée inquiète les habitants de la cité Archevêque

Publié le par MG

ANICHE : une sculpture abandonnée et dégradée inquiète les habitants de la cité Archevêque

Découverte de manière fortuite ce lundi 24 octobre 2022 à proximité du terril n°217 dit L’Archevêque de l’ancienne Compagnie des mines d’Aniche (59580), une sculpture dracoctone étêtée et fortement dégradée de 70 cm de haut environ intrigue, en cette veille d’Halloween, la communauté internaute et devient l’objet de fallacieuses interprétations. En réalité, cette représentation féminine en plâtre patiné façon vieux bois évoque la sainte patronne de la ville de Tarascon.

Debout, vêtue d’une robe à taille haute et d’un voile épais à mentonnière à la mode du dernier quart du XVe siècle et du tout début du XVIe siècle, une femme en pied tenant avec sa main droite un seau à eau bénite et, avec celle manquante, un probable goupillon, piétine un dragon à l’expression ridicule. L’ensemble renvoie indéniablement à une ronde-bosse située dans la cathédrale d’Angers.

Cette iconographie d’un exorcisme de dragon pratiqué par une femme nous écarte de l’hagiographie de Sainte Victoire provoquant l’affrontement avec la bête et de celle de Sainte Marguerite d’Antioche avalée par le monstre, dont elle transperça le ventre au moyen d’une croix pour en sortir indemne. La sainte retrouvée à Aniche n’est autre que la vierge et disciple Marthe de Béthanie, rare témoin féminin de la Résurrection du Christ.

ANICHE : une sculpture abandonnée et dégradée inquiète les habitants de la cité Archevêque
ANICHE : une sculpture abandonnée et dégradée inquiète les habitants de la cité Archevêque

Selon la tradition, Marthe se serait établie avec Lazare et Marie de Béthanie en Provence après la mort de Jésus. Dans sa Légende dorée, le dominicain et archevêque de Gênes Jacques de Voragine (ca. 1230 -ca. 1299) raconte, par opposition à sa sœur Marie la Contemplative, que l’active Marthe arrivée dans le sud de l’actuelle France chasse la Tarasque, animal hantant les marécages et terrorisant la population près de Tarascon.

Dragon à six pattes courtes, plus massif qu’un boeuf couvert d'une carapace de tortue et muni d'une queue écailleuse se terminant par un dard de scorpion, il finit par se soumettre à la bénédiction de Marthe. En cette ère marquée par la délirante crise politico-hygiéniste et le réel dérèglement climatique, le danger de cette bête surgissant de l’eau et terrassée par la foi communautaire interpelle notre individualisme et notre autosuffisance.

Au-delà de la signification de ce plâtre moulé représentant sainte Marthe et la Tarasque, on s’intéressera au traitement du visage émacié de la femme, des drapés anguleux et incisifs du voile et des vêtements et de la sérénité émanant de l’attitude générale de celle que la légende assimile à Marie-Madeleine. Si les dégradations de l’objet ne nous permettent pas à ce jour de connaître l’atelier de fabrication, une chose est sûre : Marthe fera taire, pour un temps encore, serpents et autres démons.

Texte et photos : MG - 25 octobre 2022.

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