Michel Meurdesoif rassemble les Anichois en hommage au résistant Jules Domisse

Voici 77 ans que Jules Domisse (1899-1941), maire d'Aniche, tombait en ce début d'automne pour ses idées, pour son insoumission sous les rafales des Nazis. Nous voilà 77 ans plus tard à nous souvenir de cet épisode ténébreux, douloureux, affreux. Jules Domisse appartient à ce peuple de la nuit qui éclaire notre raison d'être et illumine notre horizon. Son humilité, sa détermination et son engagement social et politique guident nos pas vers une liberté certaine. Domisse n'est point une légende ; il incarne toujours l'action, le renoncement à la sédition. Comment ne pas l'oublier ?

A l'instar de Jean Moulin, Jules Domisse rappelle le combat pour une ville libre, pour une France libre, pour un monde libre. En l'habituelle absence de la majorité politique de la commune d'Aniche depuis 2014, en dépit de la volonté du premier magistrat Marc Hémez de faire table rase de l'histoire douloureuse, partisans du PCF et de la France Insoumise se joignent aux côtés de la famille pour rendre hommage au héros local et autres victimes de la tyrannie. Michel Meurdesoif, maire honoraire sensible au devoir mémoriel, nous rappelle encore que Jules Domisse n'est pas mort en vain. Son discours retranscrit ci-après est riche d'enseignement.

Texte et photos : MG - 22 septembre 2018.

"Pourquoi continuer à rappeler ce qui s'est passé le 26 septembre 1941 ?

D'abord pour honorer un homme, Jules Domisse, dont la bonté, le souci d'autrui, le désintéressement, entre autres qualités, lui avaient valu le respect de ses camarades de travail et la confiance des électeurs. Il ne s'est jamais caché, il n'a jamais fui. Il ne pouvait imaginer le sort qui serait le sien.

Ensuite, pour souligner le sacrifice ultime où l'ont conduit la fermeté de ses convictions et la fidélité à son idéal communiste.

Mais aussi pour rappeler que les idées qui ont jeté sur l'Europe cette vague de barbarie ne sont malheureusement pas à ranger dans les archives.

Il faut également évoquer d'autres noms, d'autres figures qui furent les compagnons de combat de Jules Domisse et dont les familles croisent quotidiennement le nom en parcourant les rues d'Aniche.

Je pourrais nous interroger sur la notion de héros quand de nos jours la moindre étoile filante est promue astre, vite et sans lendemain. 77 ans ont passé, et pas une année, sa famille, ses camarades, des inconnus, n'ont manqué ce rendez-vous. Voilà la justification de cette appellation de héros. Tous ceux qui se sont succédés tout au long de ces 77 années, ont ressenti la nécessité de rendre hommage à Jules Domisse, dont le sacrifice illustre la profondeur de la barbarie.

Parmi les soldats qui constituaient les pelotons d'exécution il y avait sans doute de bons maris et de bons pères de famille, des jeunes appartenant à la même classe sociale que ceux qu'ils devaient mettre à mort.

« La guerre est un crime dont les ouvriers sont les principales victimes », a écrit dans sa dernière lettre un de ces otages. Et c'est bien ainsi que se passèrent les choses : les autorités de Vichy demandaient que l'on prépare des listes de meneurs qu'elles pourraient fournir à l'occupant. Jules Domisse et Louis Chantreau ont dû être présents sur les premières.

Mais n'oublions pas non plus que ce sont également les ouvriers qui ont animé et conduit à la victoire les mouvements de résistance. De Gaulle recevant les représentants du patronat à la Libération rappelait que la classe ouvrière était la seule qui n'avait pas trahi et leur posait la question « Où étiez-vous pendant ce temps-là ? »

Ces patrons-là se sont enrichis de la guerre : avant, pendant, après. Jaurès, première victime de la guerre de 1914, disait en substance que le capitalisme porte la guerre comme la nuée porte l'orage. Les Etats, les dirigeants, les partis belliqueux pourront toujours compter sur la finance apatride. La force de résistance de la classe ouvrière en l'attaquant ne se trompe pas de combat.

Sans en être pleinement conscient, Jules Domisse menait ce combat. Naturellement, intuitivement, il savait que la haine, la xénophobie et le racisme divisaient la classe ouvrière et l'affaiblissaient.

Les grèves patriotiques des mineurs qui s'en prenaient aux moyens de production d'énergie ont vu lutter au coude à coude des ouvriers français, polonais, italiens.

Se rassembler pour s'engager à poursuivre son combat est un des meilleurs hommages que l'on puisse rendre à Jules Domisse.

A sa famille, aux familles de ses frères de combat, je veux dire, au nom de la section d'Aniche du Parti Communiste Français, notre fierté, après trois générations, d'être encore à vos côtés. Nous suivons le chemin, qu'ils ont parcouru dans la souffrance et dans l'honneur."

Discours de Michel Meurdesoif, maire honoraire d'Aniche, en hommage à Jules Domisse le 22 septembre 2018.