Astérix, L'Iris blanc : une subliminale aventure pour Gaulois insoumis

Publié le 27 Octobre 2023 par MG

Catégories : #Arts

Première de couverture : Astérix, "L'Iris blanc", Les Editions Albert René, 26 octobre 2023.

Par Toutatis, le 40e album d’Astérix nous est tombé sur la tête ce jeudi 26 octobre ! Tiré à deux millions d’exemplaires en Gaule et déjà traduit en 19 langues, L’Iris blanc est le fruit – ou plutôt la fleur - de la collaboration entre Didier Conrad, qui contribue pour la sixième fois au renouveau du mythe graphique et Fabcaro, le très attendu auteur du burlesque Zaï, Zaï, Zaï, Zaï (2015).

Dans cette dernière aventure, structurée comme celle de La Zizanie (1970), Le Devin (1972) ou encore Obélix et Compagnie (1976), un élément perturbateur incarné par Vicévertus, médecin chef des armées de César, cherche à briser l’harmonie du plus célèbre village d’Armorique en usant d’aphorismes. Ces belles paroles, méthode de la nouvelle école de pensée positive pour tromper les irréductibles Gaulois, ne sont pas sans rappeler les formules creuses employées par Macron à l’égard des « Gaulois réfractaires au changement » que nous sommes. D’ailleurs, on lira Jupiter au travers ce propos lancé, page 6, par un tribun militaire : « on met des sesterces de dingue dans ce village gaulois qui résiste encore et toujours ! »

Astérix, L'Iris blanc : une subliminale aventure pour Gaulois insoumis

Lorsque les villageois, cernés par quatre camps de légionnaires romains, découvrent cette philosophie dite de « l’Iris blanc », qui recommande de manger sain, de pratiquer une activité sportive et de privilégier le dialogue plutôt que la violence physique, une scission oppose très vite les pro et les anti du complot orchestré depuis Rome. Pour Fabcaro, « l’Iris blanc n’est pas une critique de la pensée positive ou d’autres formes de développement personnel. Ce sont plus les gourous qui me dérangent. Ces personnes qui, par la séduction, le charisme et le verbe, essaient de profiter de la fragilité de certains pour avoir une emprise sur eux, pour avoir du pouvoir. Du médecin véreux au pouvoir politique ! »¹ Véran odium parit ?

Comme pour la calomnie, la superstition et le libéralisme économique dans les albums précédemment cités, la novlangue et autres préceptes de la pensée positive, vont buter sur la sagacité d’Astérix, le pragmatisme d’Obélix et la méfiance de Panoramix. Entre la solidarité qui forge l’identité gauloise et les sophismes de Vicévertus, dont les traits empruntent ceux du Dauphin De Villepin et du sanguinaire BHL, le lecteur prendra aussi plaisir à voyager à côté de trottinettes, dans les embouteillages et au coeur du snobisme ambiant de Lutèce.

Si Idéfix est quelque peu mis de côté dans cette nouvelle aventure d’Astérix, les nostalgiques de l’époque Goscinny-Uderzo se régaleront des incessants jeux de mots et de certains anachronismes qui défilent tout au long de cet épisode politique d’une grande fraîcheur – y compris celle des poissons d’Ordralfabétix ! Et, comme rappelle Didier Conrad, « un album d’Astérix est toujours politique. On se sert d’une antiquité gauloise qui n’a aucune réalité historique pour parler de notre époque. »²

Texte et photos : MG - 27 octobre 2023.

1. Interview de Fabcaro, "40e album d'Astérix : Fabcaro mise sur l'intrigue psychologique dans L'Iris blanc", Franceinfo, 26 octobre 2023.

2. Article de Benjamin Chapon, "Astérix : L'Iris blanc raconte comment les gourous nous menacent", 20 Minutes, 26 octobre 2023.

Après une longue expédition en terres sarmates dans "Astérix et le Griffon" (2021), c’est principalement au village que se déroule ce nouvel épisode de "L'Iris blanc" (2023). Un étrange état d'esprit semble s'être emparé des habitants au grand désarroi d'Astérix et d’Obélix…