La Société quinquagénaire d’Histoire d’Aniche célèbre les 250 ans de la création de la Compagnie des Mines d’Aniche
Y avot bin tort ch’tilo qui n’est pas allé vir’ l’expo su les « 250 ans de la création de la Compagnie des Mines d’Aniche » !
Introduite par Wadeck, le grand mineur conçu en 2017 par l’ADALA, et encadrée par les géants Casimir (2004) de Fenain, Claude-Constant-Esprit Jouvenel des Ursins d'Harville Marquis de Traisnel (1986) et son épouse Marie-Antoinette Goyon de Matignon (2003) de Villers-au-Tertre et Marcel Landrieux dit « Min Poil » (1948) de Sin-le-Noble, cette vaste exposition-souvenir de l’exploitation minière depuis le premier conseil d’administration de la Société des Mines d’Aniche constituée le 11 novembre 1773 était composée de près de 500 documents et objets s’étalant sur plusieurs rangées dans la salle Claudine-Normand.
Ne manquait à cet événement historique que la présence de Kopierre qui, avant d’être tambour major de l’armée impériale, commença à exercer en tant qu’aide-forgeron dans les ateliers... des mines d’Aniche !
Evidemment, cette exhibition didactique a évoqué le Carbonifère, période géologique du Paléozoïque durant laquelle le charbon s’est formé, et les raisons qui ont conduit une poignée d’industriels à investir dans l’extraction de cet or noir enfoui dans les profondeurs de notre sol. Nos aînés de la Société d’Histoire d’Aniche, organisateurs de cette manifestation culturelle, ont aussi recensé et détaillé les nombreuses fosses, qui plongeaient des milliers d’hommes dans une nuit permanente.
Exposition et vernissage de l'exposition "250 ans de la création de la Compagnie des Mines d'Aniche" - Photos : 10 novembre 2023.
Ce fut dans la nuit du 11 au 12 septembre 1778 que l’on découvrit du charbon à la fosse Sainte-Catherine située sur l’actuel boulevard Vaillant-Couturier. En 1930, rappela Michel Debève, président de la Société d’Histoire d’Aniche lors du vernissage de l’exposition, « la Compagnie des Mines d’Aniche comprenait 25 puits en activité répartis dans 13 communes du Douaisis et employait 15000 ouvriers. On comptait 7752 logements dont 7000 en corons, 9 écoles, plusieurs églises comme à Waziers ou à De Sessevalle, des salles des fêtes notamment celle d’Auberchicourt et 10 dispensaires et pharmacies mutualistes. »
On pouvait suivre, pas à pas, l’évolution des métiers pratiqués par ces mineurs et on se souviendra longtemps encore tant des catastrophes que des maladies liées à cette quête frénétique d'un combustible coincé dans les entrailles de la terre. Mais l’exposition ne se limitait pas à cette noirceur, ni aux affres, elle présentait d’autres thématiques liées au sujet tels les festivités, les activités culturelles et sportives, l’habitat, le mode de vie et l’immigration, notamment polonaise.
Si l’exploitation minière cessa en 1990, nous célébrions, ce week-end du 10 au 12 novembre, un anniversaire pour ne jamais oublier ceux qui ont façonné notre paysage et contribué au développement économique du pays en donnant de leur vie.
Texte et photos : MG - 10 novembre 2023.
ANICHE : à propos de la fosse Traisnel...
Le long de l’actuelle rue Fendali, qui mène à Bruille-lez-Marchiennes, se trouvait la fosse Traisnel, nom du marquis fondateur de la Compagnie des Mines d’Aniche. Son activité démarra en 1856 mais s’arrêta vingt ans plus tard. Dès lors, elle servit à l’aérage des fosses L’Archevêque et Sainte-Marie. Il fallut attendre 1919 pour que l’on reprît, le temps de reconstruire L’Archevêque, l’extraction du charbon en cet endroit. L’année suivante, l’exploitation cessait définitivement. Le chevalement métallique fut détruit en 1951, le puits de 393 mètres remblayé en 1952 et mis en sécurité en 1980. Ne restent aujourd’hui que deux dalles de béton superposées.
Les deux photographies ci-dessus, retravaillées à partir de documents extraits de l’ouvrage de Jean-Marie Minot et Didier Vivien, Le groupe d’exploitation de Douai (Ed. De l’Escaut, 2021), ont été certainement prises entre 1900 et 1918. Elles sont exceptionnelles car elles montrent le chevalet en bois d’origine et l’intérieur du triage.
Jusqu’en 1939, les immigrés polonais étaient majoritairement des ouvriers influencés par la propagande communiste. Mais, suite à la défaite de la Pologne en 1939 face à l’Allemagne et l’occupation du territoire par l’URSS, de nombreux officiers et jeunes intellectuels polonais cherchèrent en France le moyen de lutter pour l’indépendance de leur pays. Le débat sur l’avenir de la Pologne allait donner naissance dans la France progressivement occupée à un grand nombre de journaux clandestins illustrant la divergence d’opinion de l’immigration polonaise : celle favorable à la politique du gouvernement polonais en exil à Londres et celle « communiste ».
La mine était l’un des sujets fréquemment abordés par la presse « communiste ». En mai 1943, Polska Ludowa (La Pologne Populaire) – Organ Wychodźstwa Pracującego we Francji (Commission des Travailleurs Migrants en France), Wolność Równość Niepodległość (Liberté, Egalité, Indépendance) revenait sur une catastrophe survenue au début du mois à la fosse Vuillemin située à Masny de la Compagnie des mines d’Aniche. Dans ce périodique irrégulier clandestin édité à Lyon par un milieu de socialistes polonais, l’événement mortel était abordé comme suit : « De la misère de l'émigration : Encore une fois, victimes de la mine ! Le 3 mai, dans le puits Vuillemin à Aniche (Nord), huit mineurs ont été ensevelis dont trois Polonais : Teodor Nowaczyk, Arseniusz, Chodor et Pawel Pieniezny. Les deux premiers ont été secourus ; il n’y a aucun espoir pour le troisième. Voici encore un de nos hommes qui a donné à la France non seulement sa sueur mais aussi sa vie. Il a travaillé dans des conditions pires que celles des mineurs en Pologne où la loi oblige l’entrepreneur à garantir la vie d’un mineur comme si c’était la sienne et non celle d’un étranger. Dans la mine d’Aniche, 130 Polonais pour 100 Français travaillent au fond ! »