Aniche : quand la ferme Delval dérange
Des grenouilles qui croassent fortement dans une mare à Grignols, un coq qui chante trop tôt à Saint-Pierre-d’Oléron, des cloches de vaches qui assourdissent à Holzkirchen (Allemagne), des abeilles qui salissent en pollinisant à Masny... et aujourd’hui des cochons qui sentent à Aniche ! Décidément, la campagne cause du tort aux fragiles organes sensoriels d’êtres aseptisés, conditionnés et condamnant toute forme de vie naturelle ou domestiquée, sauvage ou élevée. A force d’approuver le tout-béton et le tout-bitume, on comprendra que pour certains les bruits et les odeurs d’animaux soient plus perceptibles, voire nuisibles que le CO2 émanant de moteurs pétaradant.
Pourtant, nous sommes toujours plus nombreux à vouloir vivre plus sainement. Mais, l’air de la campagne ne séduira, bien sûr, que celles et ceux qui font l’effort de comprendre un tant soit peu le mode de vie rural. En matière d’alimentation, notre attention se porte également sur la qualité des produits vendus que nous cherchons au travers de leur traçabilité. Ne préférerons-nous pas l’authentique au synthétique, le naturel à l’industriel ? Alors comment expliquer les différends qui opposent chaque jour davantage habitants et producteurs, riverains et agriculteurs ?
La ferme Delval - Aniche et Emerchicourt.
Installée depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale au 54 rue Verrier à Aniche, la famille Delval s’est toujours montrée soucieuse de vendre en toute transparence, tant sur place que sur les marchés, ses viandes à partir d’un cheptel composé de bœufs de race limousine nourris à l’herbe et de porcs élevés sur paille. Cependant, l’exploitation porcine de Nathalie Delval et de son mari fait actuellement l’objet d’une procédure judiciaire qui les contraint à verser 200 euros par jour à des voisins ayant cherché à vendre leur terrain en vue de construire des logements.
Respectueux des normes qui obligent à maintenir une distance de 50 mètres entre bâtiments d’élevage et habitation, soucieux du bien-être animal et répondant aux attentes d’une clientèle préoccupée par la préservation de notre environnement et par le développement des circuits-courts, le couple Delval doit, depuis 2016, dédommager son voisinage à hauteur de plus de 58000 euros. Une somme exorbitante pour ce jeune couple anichois à qui l’on a aussi exigé de déplacer des porcs dans un délai de moins de quatre mois.
A ce jour, la famille Delval a délocalisé au plus vite et du mieux qu’elle a pu son élevage porcin à Emerchicourt, ne laissant sur place que les boeufs. Nathalie, minée par les fastidieuses démarches administratives et cette procédure, rappelle que « les enfants ne savent plus ce qu’est un animal ; demain, ils ne verront plus rien tant dans notre ferme qu’ailleurs. » Humble et surtout épuisée par cette affaire, elle oublie que si elle échoue, c’est nous qui serons à la fois responsables et victimes de la mort programmée de notre environnement, de cette qualité de vie que nous recherchons tant !
Texte et photos (à l'exception de mention contraire) : MG - 7 octobre 2019.
- Soutenons la ferme Delval sise 54 rue Verrier à Aniche en cliquant sur CAGNOTTE - condamnation d'une exploitation.