Les temps sont difficiles pour ceux qui aiment la liberté
Libertaire, je peine au fil des années à trouver ma place dans une société toujours plus liberticide. Cela ne fait pas de moi un être résigné renonçant aux droits politiques. Au contraire, l’organisation et l’exercice du pouvoir en France me préoccupent autant qu’ils m’inquiètent. Je suis un citoyen qui aime la liberté avant d’être un électeur conditionné. Certains se complaisent dans la soumission, moi, je souffre, intellectuellement et moralement, de vouloir rester libre.
Or, les gouvernements successifs et les populations préfèrent l’efficacité à la liberté. Depuis la fin du XXe siècle, la propagande sécuritaire et les renoncements parlementaires ont progressivement gommé des Droits de l’Homme et du Citoyen et de la Constitution la possibilité de dire et d’agir sans contrainte et sans condamnation. C’est ce que dénonce François Sureau (né en 1957), haut fonctionnaire, avocat et écrivain, membre de l’Académie française, dans son ouvrage Sans la liberté (Ed. Gallimard, 2019). Aujourd’hui, les gouvernants intimident, exercent une pression quasi-militaire sur les citoyens et les citoyens se pensant davantage comme individus réclament des droits pour eux-mêmes et des supplices pour les autres.
S’il me paraît important de jouir du droit de (me) contredire et d’aller où bon me semble, nombre de Français s’en remettent à l’État du soin de leurs libertés laissant ainsi « la police s’installer au salon, vider la cave et taquiner les dames. » Voulant, par intérêt, les satisfaire, les dirigeants politiciens se sont aventurés dans les domaines de la liberté de la presse, d’expression, de conscience et de manifestation. On fiche – de plus en plus numériquement - tous ceux qui roulent à vélo ou portent un vêtement qui dérange ou qui déroge à la règle.
Ce durcissement des dispositions répressives semble convenir sinon rassurer le plus grand nombre. C’est moral et c’est bien. Le gouvernement de Vichy satisfaisait aussi la majorité des Français quand il mit fin à la République, à la démocratie et aux libertés tant individuelles que collectives. La masse bêlait hier comme elle le fait aujourd’hui pour des raisons identitaires et sécuritaires. A quelques jours des législatives, gardons en mémoire que « si la droite a abandonné la liberté comme tradition, la gauche l’a abandonnée comme projet. »
A vouloir défendre la liberté, le citoyen est devenu un délinquant en puissance en vertu, notamment, de la « loi anticasseurs » promulguée le 10 avril 2019. Suspect en tant qu’opposant aux lois d’intrusion et de répression dans la vie réelle et virtuelle réclamée par les adeptes d’un contrat social à la chinoise, il ose espérer que le peuple, moins couard et doté d’un plus grand discernement, se montrera prochainement plus fraternel et plus enclin à la liberté d’autrui.
Texte et photo : MG - 14 juin 2024.